Satisfaire aux normes de durabilité devient une préoccupation de plus en plus impérieuse pour les entreprises du monde entier. Ces dernières années, la France a entrepris de s’affranchir de sa dépendance à l’égard des combustibles fossiles et a élaboré plusieurs textes législatifs destinés à lutter contre les effets destructeurs du réchauffement climatique, qui se traduisent par une perte de biodiversité, de mauvaises récoltes et l’exacerbation de phénomènes météorologiques tels que les sécheresses prolongées et les crues soudaines. Le pays a été le premier à mettre en place la loi anti-gaspillage de 2020, dont l’objectif est d’éradiquer la pollution dès les phases de conception et de fabrication des biens et des produits. Cet objectif peut paraître simple et relativement facile à atteindre, mais il faut en réalité des changements fondamentaux pour y parvenir.
Il convient de mettre en œuvre un modèle économique plus circulaire au lieu de se concentrer sur l’approche linéaire, dont on sait déjà qu’elle est loin d’être durable. Une économie linéaire se sert de ressources limitées pour continuer à créer des objets qui ne sont généralement même pas utilisés à leur plein potentiel avant d’être mis au rebut, ce qui a conduit aux problèmes croissants des décharges qui débordent et de la pollution. La France s’est engagée à atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050, mais les initiatives en matière de développement durable doivent être renforcées entre-temps. Plusieurs petites étapes peuvent être franchies d’ici là, car la véritable durabilité ne peut être atteinte du jour au lendemain, et il faut des efforts pour en garantir l’efficacité.
Structures d’entreprise
De manière générale, les cultures d’entreprise dictent la direction que prendra une entreprise sur la voie du développement, à la fois à court et à long terme. En France, plus de 50 % des directeurs généraux prévoient le budget et approuvent les stratégies et les plans d’action écologiques, mais moins de 10 % d’entre eux sont responsables de la manière dont ces politiques se déroulent et de leur réussite finale. La responsabilité incombe principalement aux hauts responsables et aux responsables du développement durable, bien qu’ils soient le plus souvent exclus de la table des stratégies. Naturellement, ce modèle engendre une grave déconnexion qui fait que les stratégies de développement durable ne produisent qu’une partie des résultats positifs qu’elles auraient pu produire, si elles devaient en produire…
Un changement dans la façon dont les décisions sont prises au niveau de l’entreprise doit intervenir afin de garantir que les entreprises deviennent plus durables et qu’elles obtiennent des résultats concrets. Si les lignes directrices et les politiques écologiques restent cantonnées au niveau théorique, les entreprises font de l’écoblanchiment et n’apportent rien de concret. Par ailleurs, il est essentiel de veiller à ce que les solutions durables soient parfaitement adaptées à leurs secteurs d’activité respectifs. Par exemple, dans l’industrie automobile, les objectifs devraient être des pratiques de fabrication plus respectueuses de l’environnement, l’utilisation de sources d’énergie et d’infrastructures écologiques, et la garantie que les fournisseurs respectent également des normes écologiques.
Recyclage
Le recyclage est l’un des principaux aspects de la durabilité et fait partie intégrante de l’économie circulaire, car il consiste à réintégrer des matériaux en parfait état dans le cycle et à les transformer en nouveaux produits. Lorsque des articles sont mis au rebut de manière classique, ils finissent dans des décharges, où ils deviennent responsables de la pollution de l’air et des nappes phréatiques. Les plastiques constituent l’un des plus grands coupables à cet égard, car ce matériau omniprésent (qui entre dans la composition d’un large éventail d’objets, des bouteilles aux textiles, en passant par les chewing-gums et les sachets de thé) peut mettre des siècles à se décomposer, et lorsqu’il le fait, il se transforme en microplastiques qui se retrouvent dans le corps humain par l’intermédiaire de la nourriture et de l’eau.
Leur impact sur la santé humaine n’est pas totalement compris à l’heure actuelle, mais il n’est certainement pas positif. Les plastiques nuisent également à la vie marine : les oiseaux, les tortues, les mammifères marins et les poissons suffoquent ou meurent de faim après avoir ingéré des objets en plastique. À la suite de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, l’entreprise énergétique française EDF a proposé de transformer une partie des matériaux restants en objets ménagers tels que poignées de porte, casseroles et couverts. Seuls les matériaux qui ne dépassent pas les niveaux de radioactivité bénéficieront de ce traitement, tandis que les autres seront envoyés dans des installations spécialisées dans le traitement des déchets nucléaires.
Environ 500,000 tonnes de métaux pourraient être mises à disposition en quatre décennies, mais comme l’association entre les matériaux et la radioactivité est naturellement controversée, les membres du grand public peuvent se prononcer sur le projet jusqu’en février 2025. Certains affirment qu’il n’existe pas de marge à partir de laquelle l’exposition à la radioactivité peut être considérée comme sûre et que les risques subsistent.
Fast fashion
L’industrie de la mode rapide devient plus dynamique que jamais, si bien que l’expression « marque de mode ultra-rapide » est devenue monnaie courante. L’empreinte carbone du secteur est à l’origine de pas moins de 10 % des émissions mondiales de carbone, car la mentalité entourant l’achat et le port de vêtements évolue. Les tendances sont plus vives que jamais et certains articles deviennent démodés en l’espace de quelques mois seulement, ce qui oblige les gens à s’en débarrasser et à en acheter de nouveaux, ce qui est rendu possible par les prix de plus en plus bas des vêtements. Ces prix sont malheureusement souvent le reflet de mauvaises conditions de travail et d’une rémunération insuffisante des travailleurs.
En mars 2024, la France a annoncé son intention de modifier son approche de la mode rapide afin de réduire son impact négatif sur l’environnement. L’aspect essentiel de cette proposition est que les contrevenants seront pénalisés par des augmentations allant jusqu’à 10 euros par vêtement d’ici à 2030. Cette mesure rendra plus coûteux pour les entreprises le fait de produire et de vendre au même niveau que jusqu’à présent. Certains analystes ont vu dans cette proposition un moyen de donner un coup de pouce au secteur de la mode du pays, qui a été touché par la montée en puissance des marques de la « mode rapide ». Toutefois, la définition de la mode rapide contenue dans le projet de loi est ambiguë, ce qui signifie qu’il n’est pas certain qui sera responsable de tracer des ventes, des prix et du nombre d’articles produits par une marque.
Certains considèrent une éventuelle interdiction de la publicité pour la mode rapide comme une solution extrême, estimant que l’accent devrait être mis uniquement sur l’élimination du contenu des publicités visant à encourager les acheteurs à faire des achats trop fréquents. Si l’accent est mis exclusivement sur l’aide à l’industrie nationale de l’habillement plutôt qu’à d’autres, le projet de loi sur la fast fashion pourrait même être considéré comme illégal. Par ailleurs, les clients pourraient également contourner la loi en commandant des articles dans des magasins situés dans d’autres pays et en les faisant expédier en France.
Le développement durable est une question difficile, et trouver les bonnes solutions pour lutter contre la surconsommation et le gaspillage s’est avéré être une entreprise aux multiples facettes. Les comportements des consommateurs et des chefs d’entreprise doivent changer pour obtenir des résultats concrets, ce qui est beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraît.